Sous le pont
On ne compte que trois galeries d’art contemporain privées en Wallonie. La galerie Cerami à Couillet est l’une d’entre elles. Et pas la moindre. Jacques Cerami a toujours milité pour que la culture soit à la base d’une renaissance de Charleroi. Il faut dire qu’exposer du beau pour du beau, ce n’est pas son truc.
« Je suis né à Charleroi, ici à Couillet. J’ai grandi sous ce pont, j’y ai fait les 400 coups, j’étais un sale gosse. Charleroi, c'est ma région, j’y suis attaché. J’ai commencé comme antiquaire en 1988. En 2001, j’ai ouvert une galerie d’art contemporain, parce que je me suis rendu compte que je voulais vivre avec mon temps. J’ai tout de suite été bien accueilli, même si j’ai surpris un peu tout le monde, surtout Bruxelles et la Communauté Française… Je suis arrivé comme un ovni dans la sphère des galeristes. Parfois je l’ai payé cher : faire venir les bruxellois et les néerlandophones n’a pas toujours été évident. Je ne voulais pas être la 130ème galerie à Bruxelles. La plupart des galeries sont subsidiées par la Communauté Française, ce qui est suffisant pour tenir le coup. Moi, je ne demande rien à personne, je veux être libre.
Mes artistes, je veux qu’ils posent des questions par rapport au monde qui les entoure. Il faut qu’il y ait un lien par rapport au monde d’aujourd’hui. Il faut que ça parle de l’humain, de l’homme, de sa fragilité.
Je ne dis pas que mes artistes sont les meilleurs, mais je peux affirmer qu’ils ne sont pas centrés sur eux-mêmes, ils parlent avec leurs tripes. On ne peut pas se permettre d’être dans de la décoration aujourd’hui. Faire comprendre un message est possible avec une œuvre, il faut s’en servir. Je ne vais pas exposer un travail sur les Gilles de Binche, juste pour pouvoir vendre des tableaux dans la région.
Aujourd’hui je remarque qu’à Charleroi il y a un plus grand intérêt pour la Culture. La Culture amène une ouverture d’esprit. Ça fait avancer la perception du monde, évoluer les esprits, l’art développe nos dimensions sociales et humanistes. Il faut voir dans 10 ans, mais si on continue comme ça, on sera gagnant.
Le restaurant ? Une pure coïncidence, la maison d’à côté était à vendre, on y a ouvert notre resto. Sotto Il Ponte, c’est la famille. Il n’y a pas un coq chef. J’y travaille avec ma femme, mes deux filles, mon beau-fils. On est très soudé. Que le resto et la galerie soient juste l’un à côté de l’autre, c’est un plus. On vient se manger une pâte juste après un vernissage. Et puis, l’Italie, c’est la vie!»
Jacques Cerami défend fidèlement des artistes locaux comme Michael Matthys et des artistes internationaux sélectionnés avec pertinence comme la suisse Iris Hutegger. Actuellement, on peut découvrir le travail de Michel Couturier qui pose un questionnement sur notre paysage urbain.